Bien que minoritaires en France, les familles recomposées sont les plus grandes, avec trois enfants ou plus dans 40 % des cas. Ce qui rend les questions autour de la succession souvent complexes… Swiss Life vous livre son éclairage pour vous aider à prendre les bonnes décisions en toute connaissance de cause.

Sur les quelque 8 millions de familles résidant en France avec au moins un enfant mineur à la maison, 717 000 sont des familles recomposées[1]. Si cette configuration familiale reste très minoritaire (9%), les familles recomposées sont en revanche les plus grandes : quatre sur dix résident avec trois enfants ou plus. Ce qui rend les questions autour de la succession souvent complexes…

Si vous (ou l’un de vos proches) êtes concerné par cette situation, vous souhaitez peut-être connaître les conséquences de votre structure familiale sur la répartition de votre patrimoine après votre décès. Quelles
sont les stratégies à mettre en œuvre pour préparer la transmission du patrimoine dans une famille recomposée ? Quels sont les mécanismes ou outils les plus utilisés pour protéger son conjoint sans désavantager les enfants ? Comment éviter les conflits ? Marie-Laure Decobert, Ingénieur Patrimonial chez Swiss Life Banque Privée, livre son éclairage pour vous aider à prendre les bonnes décisions en toute connaissance de cause.

En matière de succession, quelles sont les premières questions que doivent se poser les couples à la tête d’une famille recomposée ?

Tout d’abord, il est important de faire un point sur la situation actuelle de la famille au regard de son statut
matrimonial (concubinage, pacs ou mariage) et d’évaluer les conséquences du décès de chacun des membres du couple. Les conséquences peuvent être multiples et notamment relatives au financement du train de vie de la famille, à la gestion et à la propriété des biens, en particulier de la résidence principale.

Il est ainsi important de vérifier que ces différentes conséquences sont en adéquation avec les objectifs de chacun en termes notamment de protection de l’autre et de protection des enfants, de  proportion du patrimoine que l’on souhaite transmettre à chacun des membres de sa famille. En effet, les enfants de l’un n’étant pas forcément les héritiers de l’autre, tout le patrimoine transmis en pleine propriété au survivant n’aura pas vocation, lors du décès du survivant, à revenir aux enfants du prédécédé.

[1] Chiffres 2020, stable par rapport à 2011 (source : Insee)

Un démembrement de propriété dans une famille recomposée n’est pas une situation confortable dans bien des cas.

Comment bien protéger son conjoint sans désavantager les enfants ?

En l’absence d’adoption réciproque des enfants du conjoint, tout ce qui lui sera transmis échappera aux enfants du premier décédé. La volonté d’une transmission à terme aux enfants sera incompatible avec la possibilité, pour le survivant, de disposer librement du patrimoine qui lui serait transmis.

Un démembrement de propriété pourrait être envisagé mais cela ne sera pas forcément suffisant au survivant pour subvenir à ses besoins s’il ne peut pas entamer le capital. Un démembrement de propriété dans une famille recomposée n’est pas une situation confortable dans bien des cas. Un lien à vie est créé
entre le survivant et les enfants du premier décédé pouvant affecter les relations entre eux et la gestion du bien au quotidien. Usufruitier et nu-propriétaire ont des objectifs différents par rapport au bien. L’usufruitier
aura à cœur d’en tirer des revenus alors que le nu-propriétaire souhaitera privilégier la plus-value à terme. 

Rappelons à cet égard que la pleine propriété d’un bien est l’addition de deux droits : l’usufruit qui permet de percevoir les revenus du bien ou de l’utiliser (s’agissant d’un bien immobilier, il pourra par exemple y habiter ou le mettre en location) et la nue-propriété qui est le droit pour son titulaire de recevoir la pleine propriété future du bien, en général au décès de l’usufruitier.

Des tensions jusqu’alors inexistantes peuvent surgir, et ce d’autant plus s’il y a un écart d’âge important entre le survivant du couple et les enfants. Si l’on souhaite que le conjoint puisse avoir la libre disposition des biens qui lui sont transmis, il faudra lui transmettre de la pleine propriété. Pour un concubin ou un partenaire de pacs, cela nécessitera la rédaction d’un testament. Et, dans tous les cas, un conseil avisé d’un point de vue civil pour respecter les règles légales de dévolution successorale (quotité disponible et réserve héréditaire).

Le bénéfice d’un contrat d’assurance-vie permettra par ailleurs de transmettre des capitaux en dehors de ces règles dans une certaine mesure. D’un point de vue fiscal, seuls le conjoint ou le partenaire de pacs sont exonérés de droits de succession. Le concubin quant à lui devra s’acquitter, sur la quote-part qui lui serait attribuée par testament, de droits de succession sans lien de parenté, au taux actuel de 60 %... Là encore, le nommer bénéficiaire d’un contrat d’assurance-vie permettra de lui faire bénéficier d’une transmission moins onéreuse. En résumé, un arbitrage sera à opérer entre la protection à accorder à son partenaire de vie et celle à ses enfants. 

Le mariage est-il forcément un gage de protection ?

D’un point de vue patrimonial, le mariage permet, par exemple d’acquérir certains droits sur la résidence principale (droit temporaire et viager au logement, possibilité d’attribution). Il permet également au conjoint d’avoir un droit légal sur la succession. En présence d’enfants issus d’une précédente union du défunt, le
conjoint pourra recueillir le quart de la succession en pleine propriété. Et d’un point de vue fiscal, le conjoint est exonéré de fiscalité successorale comme de fiscalité sur les capitaux décès qui lui seraient attribués.

Que se passe-t-il en l’absence de testament ?

Le concubin ou le partenaire de pacs n’ont aucun droit sur le patrimoine du défunt. Un point à ne pas oublier si la résidence principale lui appartient. Et si elle avait été acquise à deux, une indivision sera créée entre le survivant et les héritiers. Situation quelquefois inconfortable… 

Qu’est-ce qu’une donation au dernier vivant ? Dans quels cas est-ce avantageux ?

La donation au dernier vivant permet d’augmenter les possibilités de choix du conjoint survivant sur la succession du prédécédé ; En présence d’un ou plusieurs enfants issus d’une première union du défunt, le survivant recevra le quart du patrimoine successoral. La donation au dernier vivant, aussi appelée donation entre époux, lui offrira des choix supplémentaires : soit la totalité de la succession en usufruit, soit la quotité disponible en pleine propriété (la moitié avec 1 enfant, le tiers avec 2 enfants, le quart avec 3 enfants ou plus), soit le quart en pleine propriété et le solde en usufruit.

Cela paraît avantageux mais attention là encore à ne pas créer une situation qui pourrait s’avérer compliquée. N’oublions pas que lorsque le choix sera opéré par le conjoint survivant, seul décisionnaire, le
défunt ne sera plus là. Selon le choix (les enfants n’ayant rien à dire), une situation d’indivision et/ou de démembrement sera créer entre les enfants et le survivant et ce, jusqu’au décès du conjoint survivant…