Le compte à rebours de l’atterrissage de l’inflation est bien enclenché mais le compteur bloque sur 3 ! Retrouvez l’analyse macro-économique de Christian Bito, vice-président de SwissLife Gestion Privée et professeur de finance à l’ESSEC.

Le compte à rebours de l’atterrissage de l’inflation est bien enclenché mais le compteur bloque sur 3 ! Même la gouverneure Isabel Schnabel, réputée membre très sévère du directoire de la Banque centrale européenne, en faveur d’une politique monétaire restrictive l’a évoqué dans sa dernière interview.

À la suite de la sortie du Covid et aux pénuries causées par le conflit en Ukraine au début de 2022, l’inflation avait décollé vers des sommets rappelant les années 80 : 9,1% d’inflation sur une année glissante aux Etats-Unis atteint en juin 2022. Afin de diminuer la hausse des prix, les banques centrales ont remonté les taux. Ainsi, les conditions de crédit sont devenues plus restrictives, ce qui a freiné la demande dans les secteurs de la consommation, de l’investissement et de l’immobilier. La hausse des taux a également impacté négativement les marchés financiers qui ont terminé dans le rouge l’année dernière.

Avec des taux directeurs passés de 0,25% à 5,5% aux USA, l’inflation a amorcé sa décrue. L’inflation CPI (Consumer Price Index, soit Indice des Prix à la Consommation) publiée début décembre est revenue à 3,1%. En zone euro, l’inflation a aussi amorcé sa décrue après son pic en octobre 2022 à 10,6%. En France, elle touche 3,4% et en Allemagne, 3,2%. Le chemin parcouru va donc dans la bonne direction, mais peine depuis l’été dernier à atteindre l’objectif affiché par la FED et la BCE de 2%.

Si la baisse des cours de matières premières et agricoles depuis les niveaux de 2022 se confirme, elle influerait dans le bon sens. Mais les prix des biens et des services résistent. L’inflation core, dite sous-jacente s’établit encore à 3% (3,5 aux USA et 3,6 en zone euro). C’est la conséquence logique des ajustements à la hausse des tarifs des entreprises qui ont répercuté les hausses de salaires réclamées. En moyenne, ces hausses sont de l’ordre de 4 à 5% depuis un an. Il est difficile d’imaginer que les salaires vont rebaisser, les prix vont donc au mieux se stabiliser. En revanche, il semble que la spirale inflationniste, la course en avant salaire-prix, ne s’enclenche pas comme dans les années 70-80. Seule la Belgique a dû augmenter tous les salaires de plus de 10% car c’est le dernier pays au monde avec Chypre et Malte à pratiquer l’indexation des salaires sur les prix. Nous avions abandonné ce système en France en 1983.

La bonne nouvelle concerne la productivité aux USA où la productivité du travail progresse de 4,7% sur un an, ce qui compense en moyenne les hausses de salaire et permet aux entreprises de préserver leurs marges. En zone euro, la productivité ne s’améliore pas, nous notons même une baisse d’environ 3% en 3 ans pour la France. Pourtant, l’inflation recule bien chez nous, la dernière estimation pour l’ensemble des pays de la zone euro à 2,4% serait la première à franchir la barre des 3%. Mais c’est peut-être au prix d’un ralentissement plus marqué de l’activité puisque la zone euro affiche une croissance au troisième trimestre de -0,4% exprimé en rythme annuel alors qu’aux USA elle est de +5% au T3 !

L’ajustement délicat entre la croissance et les taux d’intérêt est donc en marche. Sauf nouvelles tensions géopolitiques qui pourraient propulser à nouveau le baril de pétrole au-delà des 90 dollars, le compteur de l’inflation devrait afficher bientôt 2%. Toutefois, il est difficile de prédire le timing exact entre aujourd’hui et la fin de l’année 2024 !

par Christian Bito, vice-président de Swiss Life Gestion Privée et professeur de finance à l’ESSEC
Achevé de rédiger le 12 décembre 2023
Source des données : Swiss Life Gestion Privée 

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